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FIDMarseille 2024 : 35ème édition

Entretien avec...
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Publié le : Mercredi 19 juin 2024

Du 25 au 30 juin se tiendra à Marseille la 35e édition du FID, avec pas moins de 112 films venant de 38 pays ! À travers une sélection riche et variée, le FIDMarseille continue d’affirmer sa vocation de festival défricheur, défenseur de formes, visions et modes de production qui font la vitalité d’un cinéma en prise sur un monde bouleversé et changeant.

Cette année, une rétrospective est consacrée à l’actrice et chanteuse allemande Ingrid Caven. Une deuxième est consacrée à Adirley Queiros et Joana Pimenta, il s’agira de la première rétrospective de leurs films hors du Brésil. Un hommage sera rendu à la cinéaste Sophie Fillières, au cours d’une programmation spéciale dédiée à son travail et celui d’Agathe Bonitzer.

Retour sur notre rencontre avec Cyril Neyrat, directeur artistique du FID.

Crédits photo : La Manufacture
_ Cette année le festival s’ouvre avec “Grand Tour” de Miguel Gomes le 25 juin sur le toit de la Friche Belle de Mai. Parlez nous de ce choix.

Chaque année, on cherche un film qui correspond à la fois à l’identité du FID donc avec une forme singulière et capable de rassembler un grand public. Le film était en compétition à Cannes cette année, cela faisait vingt ans qu’un film portugais n’avait pas été sélectionné.

Miguel Gomes est un cinéaste que le FID a toujours soutenu, on a montré tous ses films, il est d’ailleurs souvent venu. Ça nous paraissait être le film idéal pour cette ouverture sur le toit terrasse de la Friche dans un cadre particulièrement spectaculaire en plein-air. Cela convient très bien à ce film qui est une sorte de voyage féérique à la fois dans l’histoire du cinéma et dans l’Asie du sud.

C’est vraiment un cinéma qu’on défend depuis le début. Le film est à la fois très audacieux et très accessible.

Plus d’information sur la soirée d’ouverture

─ En parcourant les différentes compétitions, certaines thématiques sont récurrentes, notamment sur des sujets de société actuels comme le féminisme ou encore des regards différents sur certains conflits armés. Est-ce que c’est la conjoncture actuelle ou une identité du FID ?

Le FID n’est pas un festival à thématique, nous refusons de classer ou catégoriser les films par les thèmes abordés. Il se trouve que les questions dont vous parlez, comme le féminisme, l’état d’un monde extrêmement violent et sombre, impactent forcément le cinéma qui nous intéresse. Cela impacte un cinéma indépendant, qui n’est pas du divertissement et qui essaie de donner à réfléchir au présent et à l’Histoire du monde.
Nous avons vocation à donner une image du cinéma contemporain qui lui-même donne une image du monde. Ces enjeux se retrouvent donc assez naturellement dans notre programmation. Nous n’allons pas chercher ces films qui traitent de ces enjeux mais on y prête une attention particulière parce qu’on sait qu’ils sont importants et qu’ils font le monde aujourd’hui.

─ En parlant de vos choix de programmation, cette année nous retrouvons un film étonnant, généré en partie par intelligence artificielle. Pourriez-vous nous en dire plus quant au processus de création ?

C’est un des films les plus étonnants cette année. Il est passionnant sur toutes les questions autour de l’intelligence artificielle dont on parle beaucoup en ce moment : soit comme un outil génial permettant de produire beaucoup de scénarios ou bien comme la fin de la pensée humaine, les robots qui remplacent les Hommes …

L’auteur a fait le pari de s’allier avec l’IA pour créer une forme d’écriture nouvelle, une écriture critique. Ce film est à la fois très drôle et très critique à propos des images de propagande venant de Chine et de Russie. Il a fait de l’IA sont alliée pour critiquer ces images. Comment ? Dans la production d’images et dans le montage. Il l’utilise pour générer du texte, des images et les déformer. Le cinéaste a d’ailleurs pris un pseudonyme : Cricri Sora. C’est le nom de cette entité nouvelle constituée d’un être humain et d’un moteur IA.

© Tandem / Shellac
─ Tout au long de cette édition, en plus des compétitions il y a d’autres moments clés comme la rétrospective consacrée à Ingrid Caven, pourquoi ce choix ?

Ingrid Caven c’est vraiment une grande dame, une grande figure de la culture européenne des cinquante dernières années. Elle nous intéresse car inclassable, à la fois actrice et chanteuse.
En tant que chanteuse, elle a vraiment inventé une nouvelle forme de récital, presque une nouvelle manière de chanter qui associe le répertoire classique aux compositeurs les plus contemporains. En tant qu’actrice elle a travaillé dans les marges les plus underground et en même temps elle est devenue cette star extrêmement identifiée presque comme une grande star du cinéma muet.

Ce qui nous plaît beaucoup chez elle, c’est qu’elle fait partie de ces grandes figures inclassables, elle a inventé sa place et son art à elle. Par ailleurs, elle est toujours active à 85 ans, son nouveau disque produit avec Albert Serra va être présenté en avant-première. C’est quelqu’un qui pense l’actualité avec beaucoup d’acuité. On veut lui rendre hommage et retracer cette carrière unique. En onze films, c’est une traversée du meilleur du cinéma d’auteur européen des cinquante dernières années.

Plus d’informations sur la rétrospective

─ Il y a une deuxième rétrospective consacrée Adirley Queiros et Joana Pimenta.

Adirley Queiros est un cinéaste brésilien dont les films n’ont jamais été montrés ensemble en dehors du Brésil. C’est un des auteurs contemporains qui réinvente vraiment le schéma politique avec un cinéma très engagé politiquement. Il est fait de manière collective avec les habitants de sa ville en périphérie de Brasília.
Depuis quelques années il coréalise ses films avec Joana Pimenta. Cette façon d’utiliser la fiction et presque le cinéma de genre pour inventer des formes de cinéma politique et engagé nous intéresse beaucoup.

Plus d’informations sur la rétrospective

─ Il y a également un coup de projecteur sur la carrière de la cinéaste Sophie Fillières et à Agathe Bonitzer

Il se trouve qu’Agathe est une jeune actrice qui aime beaucoup réfléchir au cinéma, elle a joué dans un film avec Ingrid Caven. Elle est aussi la fille de Sophie Fillières qui est sans doute l’une des cinéastes françaises les plus brillantes de sa génération, trop méconnue de son vivant. Elle est dans un genre difficile qui est celui de la comédie sophistiquée. Elle a vraiment amené une tonalité très personnelle à la fois très intime et très amer et joueuse. C’est un grand auteur du cinéma français décédée il y a quasiment un an maintenant. On voulait lui rendre hommage d’autant qu’Agathe et son frère ont terminé son dernier film « Ma vie, ma gueule ».

Plus d’informations sur la programmation

─ Le festival se clôture sur le dernier film du cinéaste français Alain Guiraudie.

Alain Giraudie fait partie, comme Sophie Fillières, des rares cinéastes français à l’écriture très reconnaissable et personnelle. C’est un très grand dialoguiste, un peu comme Sophie. Il travaille la comédie mise au service d’une critique sociale. Ce film a été présenté à Cannes Première lors du Festival Cannes 2024.
On l’a déjà accueilli au FID, on est très heureux de clôturer le festival avec ce film. Un peu de la même façon que Miguel Gomes, c’est un film avec une grande exigence d’écriture et très grand public.

La programmation est dense, avez-vous un film qui vous a particulièrement interpelé ?

En compétition internationale, on présente le nouveau film de Mariano Llinás « Kunst der Farbe » avec deux autres films dans d’autres compétitions. Ces trois films composent un triptyque assez jubilatoire. C’est une espèce de détournement d’une commande de portrait d’artistes pour en faire des sortes de comédies sur le cinéma, le montage, sur les couleurs. C’est un des grands inventeurs de forme du cinéma contemporain, ces premiers films avaient marqué leur temps. Je suis particulièrement heureux de l’accueillir avec 3 films.

Je pense aussi deux films en compétition française. « La chambre d’ombres » de Camilo Restrepo là aussi un cinéaste reconnu et affirmé. Avec ce film, il invente une forme très étonnante, plastiquement très belle pour réfléchir à la relation entre les images et la violence, entre les images de l’art et la violence du monde pour être plus précis. C’est un film très audacieux.

L’autre film en compétition française c’est « Les Loups », le nouveau long-métrage d’Isabelle Prim. C’est un film qui propose par les moyens du théâtre et de la folie, un voyage entre le 18e et 20e siècle, entre la traque de la bête du Gévaudan et l’invention d’une nouvelle manière de prendre soin de la folie. C’est un film important.

La programmation complète du festival est à découvrir ici !

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Entretien réalisé par Naomi Camara.

Crédits photos : GRAND TOUR de Miguel Gomes / Tandem
MISÉRICORDE d’Alain Guiraudie / Les films du losange

Crédits photo top :
Ma vie, ma gueule de Sophie Fillières © Christmas in July, Jour2Fête

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