Séances Spéciales vous emmène à la rencontre du cinéaste Karim Moussaoui, à l’occasion de la sortie de son second long métrage L’Effacement, en salles le 7 mai 2025.
C’est votre 2ème long métrage de cinéma, cette fois-ci il s’agit d’une adaptation. Pourriez-vous revenir sur votre rencontre avec l’œuvre de Samir Toumi et sur la raison qui vous a donné envie d’en faire un film ? Connaissez l’auteur du livre ?
Karim Moussaoui : En 2017, avant l’avant-première de mon premier long-métrage « En attendant les hirondelles » une amie me l’a conseillé. Deux jours après, j’avais envie de l’adapter. Le livre parle de liens intergénérationnels. Dans le livre, le personnage de 40 ans voit son reflet disparaître à partir du décès de son père. On apprend à connaître le père à travers le personnage principal, contrairement au film.
J’ai parlé à Samir Toumi de mon projet, une adaptation libre puisque j’ai pris la liberté de faire exister le père. Je pensais que mon film n’était pas très fidèle au livre, mais avec le temps, je me rends compte qu’il l’est. À part le service militaire, que j’ai ajouté, je n’ai modifié que des détails.
Quand je l’ai lu, j’avais envie d’être un peu moins réaliste que dans mes précédents films, qui sont représentatifs de certaines réalités algériennes. Cette fois, j’ai voulu flirter avec le genre, m’éloigner un peu de la réalité. Mais la thématique est contemporaine, pas uniquement en l’Algérie. Il y a quand même quelques éléments qui sont liés, notamment ce père d’une génération d’après-indépendance. Mais je pense qu’on peut s’identifier sans être algérien.
Le rôle de Reda, notamment son regard, est très important. Comment avez-vous rencontré Sammy Lecchia ? Et comment avez-vous travaillé le rôle avec lui ?
K.M : J’ai rencontré Sammy via un casting, ce fut un coup de cœur. Il venait de terminer une série et il avait déjà joué dans un court-métrage. En faisant les essais, j’ai eu le pressentiment que ça serait lui. On a fait quelques essais, puis je lui ai proposé de me suivre à Alger pour prendre la température. Et bien qu’il y soit déjà souvent allé, il ne connaissait pas le milieu bourgeois algérois, les expos…
C’était pour qu’il découvre le milieu dans lequel évolue Reda ?
K.M : Oui un milieu dans lequel il pourrait évoluer. Le personnage de Reda ne fréquente pas ces milieux, il est plutôt ce fils qui exécute la volonté du père, il reste à la maison, il fait du sport, il est isolé socialement. Il se retrouvera finalement embauché grâce à son père.

La relation de Reda à son père est complexe, entre domination, respect. Est-ce qu’il y a une part autobiographique ?
K.M : Non mais j’ai rencontré des amis pour qui ça l’est, comme l’auteur (qui est un ami). Ça représente plutôt une génération dont les valeurs étaient l’autoritarisme, il fallait être un « homme fort ». Ils ont du mal à comprendre que ce n’est pas la même époque, il y a une nouvelle génération. C’est celle des années 1970-80 et qui n’a pas forcément connue l’époque de la guerre ou même de l’Algérie des années 1960. Ils ont d’autres désirs que leurs parents. Les défis d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. Parfois, il y a un choc entre les 2 générations.
L’histoire se déroule à Alger mais vous avez tourné à Marseille et en Tunisie, pourquoi ce choix ?
K.M : C’est un film qu’on devait tourner à Alger, dans un quartier d’affaire qui ressemble à celui de la Joliette à Marseille. Pour des raisons économiques et pratiques, nous avons décidé de tourner à Marseille et en Tunisie. Nous n’avons pas reçu de financement de la part du ministère de la Culture algérien. On est passé par la Tunisie pour obtenir d’autres types de financement, c’est un cumul de raisons qui ont fait qu’on n’a pas tourné en Algérie.
Crédit photo : Les Films Pelleas
Entretien réalisé par Naomi Camara